Les Suisses ont accepté par 78,7% de compléter la Constitution par un article sur la sécurité alimentaire. Les Romands ont été les plus enthousiastes.
Les Suisses sont très attachés à la sécurité alimentaire. Dimanche, 78,7% d’entre-eux ont dit «oui». Aucun canton n’a refusé. Environ 1’943’000 citoyens ont déposé un «oui» dans l’urne, contre un peu moins de 525’000 «non». Les cantons les moins convaincus ont été Schwyz (69,1%), Glaris (69,1%) et Appenzell Rhodes-extérieures (70,4%). Les Latins ont eu le moins de doutes. Le nouvel article a été plébiscité par les Vaudois sur le score quasi soviétique de 92%. Ils sont suivis des Jurassiens (89,8%), des Genevois (88,3%) et des Neuchâtelois (88,1%). Le Tessin a accepté l’arrêté par 87,7%, Fribourg par 85,2%, le Valais par 84,3% et Berne par 76%. |
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Initiative retiréeLe vote a été déclenché par une initiative populaire de l’Union suisse des paysans. Les initiants ont toutefois retiré leur texte au profit d’une proposition plus consensuelle concoctée par le Parlement. Le nouvel article constitutionnel prend en compte toute la chaîne de production des denrées alimentaires, du champ à l’assiette. La Confédération devra créer les conditions pour préserver les bases de production agricole, notamment des terres agricoles, de même que veiller à une production adaptée aux conditions locales et utilisant les ressources naturelles de manière efficiente. L’agriculture et le secteur agroalimentaire devront répondre aux exigences du marché, mais les relations commerciales transfrontalières contribuer au développement durable. Les denrées alimentaires devront être utilisées de manière à réduire le gaspillage. |
Fronde très limitée
Le Conseil fédéral, les associations environnementales, l’industrie agroalimentaire et tous les partis siégeant au Parlement ont milité pour le «oui». La fronde s’est limitée à l’Alliance pour la souveraineté alimentaire, inquiète d’un affaiblissement des paysans face au marché. L’UDF et l’Union suisse des arts et métiers avaient aussi appelé à voter «non».
Avec le nouvel article, la charte fondamentale reflétera tous les principes de la politique déjà menée pour assurer l’approvisionnement du pays. Il ne devrait donc pas être nécessaire de procéder dans la foulée à de grandes modifications de loi. Cela n’empêchera pas les différentes visions de l’agriculture de continuer à s’affronter.
Rien à faire dans l’immédiat
Le ministre de l’économie Johann Schneider-Ammann s’est montré très satisfait du résultat «pas tout à fait inattendu» concernant la sécurité alimentaire. Le vote n’obligera pas à adapter des lois ou des ordonnances, mais il donne le cap de la politique agricole à venir, a estimé le libéral-radical.
Et de saluer un article constitutionnel qui jette les bases pour assurer l’alimentation à venir, ouvre de nouvelles perspectives aux paysans et mise sur une économie ouverte et florissante au service de la population.
Satisfaction générale
Le peuple suisse soutient fortement l’agriculture indigène. C’est ainsi que les partisans de l’article constitutionnel sur la sécurité alimentaire interprètent sa large approbation dimanche en votation. Les partis politiques, la majorité des agriculteurs et les organisations environnementalistes saluent le résultat à l’unisson.
«Le peuple veut préserver une agriculture de proximité forte et garder en partie la main sur le contenu de son assiette», a réagi Jacques Bourgeois, directeur de l’Union suisse des paysans (USP) au nom d’un comité interpartis, mené par l’USP. Cet article permet de faire face à des défis tels que la démographie, le sol qui disparaît ou le réchauffement climatique, a-t-il ajouté auprès de l’ats.
Pour le conseiller national (PLR/FR), ce nouvel article permet aussi de continuer à renforcer la qualité des produits et doit viser à offrir des conditions décentes aux familles paysannes. Autre élément important à ses yeux: pour les produits importés, la Suisse tiendra désormais davantage compte de la durabilité, donc de facteurs environnementaux et sociaux à l’étranger.
La Suisse pionnière, selon l’USP
Même son de cloche du côté du conseiller national Jacques Nicolet (UDC/VD): «C’est un signal fort en faveur de l’agriculture suisse et des produits indigènes». Mais l’agriculteur tempère: «Ce n’est qu’une victoire d’étape, car il faudra ensuite concrétiser cette base constitutionnelle dans la législation».
Tous les partis représentés au Parlement soutenaient l’article constitutionnel. Un comité regroupant les Verts, le PVL, le PS et le PLR se réjouit certes de cette voie vers plus de durabilité, mais il salue aussi l’ouverture au marché. «Le contre-projet permet toujours de conclure des accords de libre-échange avec d?autres pays qui contribuent à un développement durable de l?agriculture».
Organisations écologistes satisfaites
Les organisations environnementalistes BirdLife Suisse, Greenpeace, Pro Natura et WWF Suisse expriment aussi leur satisfaction. A leurs yeux, le plébiscite de dimanche constitue un «mandat clair» du peuple «en faveur d?une agriculture plus durable et plus écologique». Mais pour mettre en œuvre la volonté populaire, des adaptations législatives sont indispensables, insistent-elles.
«Il faut notamment diminuer l?emploi des pesticides, promouvoir la biodiversité et protéger les terres cultivables», selon Urs Leugger-Eggimann, secrétaire central de Pro Natura.
L’usam contre de nouvelles subventions
L’Union suisse des arts et métiers (usam) était une des rares organisations à prôner le «non». Si cette décision est à respecter, il ne doit toutefois pas en découler de nouveaux droits à des subventions ni de réglementations supplémentaires. Et la politique agricole ne doit pas entraver les accords internationaux de libre-échange, écrit l’usam.
Dans le camp du «non» figurait aussi l’Alliance pour la souveraineté alimentaire, qui regroupe environ 250 personnes et organisations de mouvements agricoles, ecclésiastiques et sociaux. Elle craint que les «relations commerciales transfrontalières» mentionnées dans l’article ne sacrifient les paysans suisses.
«Nous n’avons pas perdu»
Pierre-André Tombez, président de l’Alliance, était néanmoins positif: «Nous n’avons pas perdu aujourd’hui, car durant la campagne, le ministre de l’agriculture Johann Schneider-Ammann a fait beaucoup de promesses».
Tout comme les Verts, l’Alliance mise toutefois sur sa propre initiative pour aller plus loin, a souligné M. Tombez. Ce texte demande notamment une agriculture sans organismes génétiquement modifiés et des mesures pour réduire le pouvoir des grands distributeurs et des grands producteurs dans la fixation des prix. (ats/nxp)
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